En premier, dans le sens de précéder, comme une cause première où s'ébauchent tous les possibles.

Je dis « lieu », pour l'espace de création que m'ouvre la poésie.
Ce haut lieu de la présence déployée à rebours du sens, ce lieu du souffle dilaté de silence, où la musique des mots nous rend à nous-mêmes et nous restitue toute la beauté du monde.

Cet accompagnement de la poésie dans mon travail pictural trouve son expression par le livre d'artiste, le dessin, les techniques de l'estampe ou la peinture. Ainsi le passage du linguistique au visuel ne se veut pas la simple traduction ou imitation du sens littéral du poème, mais plutôt comme une cohabitation du même lieu d'origine. Ce glissement se manifeste par une filiation d'images, de formes, de couleurs ou de matière suivant le sens métaphorique.

Quelquesfois, par un jeu de décomposition des éléments plastiques suggérés et par la perspective de nouveaux rapports entre eux, la rhétorique de l'image cherchera un nouvel ordre signifiant. Mais cette « recréation » de la poésie à l'image s'opère surtout par une affinité de silence, où la connaissance sensible cherche une voie d'immersion dans la « présence ».